Photographies et documents sur la vie

du chanoine Georges DELLWALL

Textes extraits de la "Notice sur Monsieur le Chanoine Georges DELLWALL par l'abbé COLLIGNON son condisciple doyen d'Audun-le-Roman"

 

L'abbé Georges DELLWALL est nommé vicaire auprès de l'abbé PEITZ de la paroisse de Sainte-Croix de Joeuf en 1909.

Pour les registres de l'état civil et religieux, celui qui devait devenir l'Abbé Georges DELLWALL était né le 30-06-1884, et avait été baptisé à Paris, le 10-7-1884. (...)

Premières années

Dans ses premières années, un nom illumina son enfance : Longuyon.

Son père, chef de train, déraciné à Paris par son service avait bientôt la nostalgie de la province natale. Nommé à Longuyon, non loin du confluent de la Crusnes et de la Chiers, il avait bâti sa petite maison. L'enfant grandit dans cette paroisse accueillante (...)

Les séminaires

Sur la fin du siècle dernier, l'élève Georges DELLWALL franchissait la porte cochère du Petit Séminaire de Pont-à-Mousson, où on l'y admettait de suite dans la classe de troisième. Ceux qui survivent aujourd'hui, voient dans leurs souvenirs, un séminariste consciencieux, ardent au travail comme un jeu ; un tantinet batailleur, ou du moins, résolu à ne laisser perdre aucun de ses droits. Il se classa dans une bonne moyenne. Trois années de cette vie commune, et le train nous menait vers le grand Séminaire de Nancy, dans cet édifice de la rue de Strasbourg, que nous avons tant regretté quand la spoliation nous en fermait les portes (...)

Les années pénibles qui suivirent la Séparation des Eglises et de l'Etat passaient comme les autres, et le Grand Séminariste gravissait au choix les étapes du sacerdoce. Dans les premiers jours de juillet 1909 (le 11-7-1909) il était ordonné prêtre par Monseigneur ALTMEYER, suppléant Monseigneur TURINAZ.

Sa première messe solennelle fut chantée à Longuyon (...)

La Guerre de 1914-1918

Le 2 août 1914, mobilisés en hâte, l'abbé PEITZ et son compagnon rejoignait à Mourmelon une formation sanitaire du 6e corps d'armée. Par son âge, le Curé de Sainte-Croix pouvait aspirer à un emploi sédentaire, éloigné de la bataille. Il choisit, avec les jeunes, l'ambulance de campagne où son vicaire était engagé. La veille, on travaillait pour l'Eglise ensemble, pourquoi pas pour la France. Mais le vicaire, lui, était caporal, et l'on vit cette chose charmante, l'ainé venir se ranger volontairement dans l'escouade de son benjamin, et l'on ne savait s'il fallait admirer davantage l'humilité du supérieur d'hier ou l'aisance tranquille de celui qui obéissait jadis et qui ordonnait le lendemain.

Le caporal DELLWALL avait un tempérament de chef ; il savait commander. Dans son ambulance de campagne, il enleva brillement les galons de sergent, puis d'adjudant, pour terminer la guerre dans un hôpital d'évacuation à Ligny-en-Barrois. Il avait eu pendant les hostilités, la douleur de perdre son père, évacué à Bar-le-Duc.

La paix victorieuse le rendait à Jœuf, où il retrouvait pour quelques années encore, son curé, lui aussi démobilisé. Il fallait reprendre en mai la paroisse, et les oeuvres anémiées, sinon détruites par quatre années de silence. Tous deux le firent avec une expérience doublée d'une belle espérance pour l'avenir ; on se reprenait à vivre après les années de deuil et de crainte. Les groupements retrouvent leur activité. La section Pierre de Bar met à sa tête une Harmonie et regagne son succès d'avant-guerre en les élargissant encore.

 

Au centre assis, l'abbé Georges DELLWALL, mobilisé comme caporal infirmier, sera nommé sergent en février 1916 ; il participe à l'attaque des Eparges en avril 1915 ; enterré par une torpille et contusionné à Vadelaincourt en août 1917, il refuse de se laisser évacuer ; il finit la guerre comme adjudant, titulaire d'une citation pour sa conduite au bombardement des hôpitaux de Vadelaincourt.

Groupe d'enfants de choeur de la paroisse Ste-Croix, en 1921. Encadrés par l'abbé DELLWALL (à gauche), Jules JUNG (au centre) , le bedeau, Louis VEGEZZI et le curé Edouard PEITZ (à droite). Ils sont photographiés sur le parvis de l'église, par Louis CHEYNET.

Rang du haut (de gauche à droite) : Jean DENIS, Jules JUNG, Jean PATENOTTE, Jean NEGRI, Louis VEGEZZI, Mr le curé PEITZ.

Deuxième rang (de gauche à droite) : Abbé DELLWALL, Eugène MAYER, Georges DENIS, ? MIRANDELLE, Joseph FELLER.

Troisième rang (de gauche à droite) : André ROUSSEL, Marcel HOUCHE, Lucien REY, Marcel GONDY, Robert KUNZ, Robert JAMAIN

Quatrième rang (de gauche à droite) : (?), Robert BERNANOSE, Gabriel RADIER, (?), Robert ROUSSEL, (?), (?).

 

Le curé de Sainte-Croix

En 1924, inopinément, l'abbé PEITZ est appelé à Nancy, pour diriger l'importante paroisse de St-Mansuy. Est-ce le départ aussi pour son vicaire ? Son éloignement était à prévoir. Mais l'autorité diocésaine rompant avec ses traditions, le nomma curé sur place. La solution était heureuse. Pour le nouveau curé pas de travail d'adaptation. Il connaissait ses paroissiens, il en était connu. La population ouvrière applaudit à sa nomination et se serra autour de son chef. Il se garda de rien changer ; à quoi bon d'ailleurs ? Les rouages de la paroisse étaient en place. Il suffisait de leur donner une impulsion rajeunie. (...)

Enfants de choeur de l'église Sainte-Croix, encadrés à gauche par le curé PEITZ, au centre Jules JUNG, et à droite l'abbé DELLWALL (vers 1923/1924).

Dans la paroisse de Sainte-Croix, la vie religieuse soulevée par le curé, les vicaires aidés d'ailleurs par des militants actifs et généreux, la vie religieuse gagnait du terrain. La population enfantine ne cessait de croître et rendait l'église étroite. A la vérité on songeait depuis longtemps à l'agrandir. Mais les obstacles paraissaient insurmontables. Etroitement cerclé par une vieille tour historique, par une rue frappant d'alignement tout terrain voisin et par un lot de maisons, le temple ne se prêtait pas à l'agrandissement (...) Un maître ouvrier de grand talent, Monsieur CRIQUI, architecte à Nancy, familier avec les plans d'églises, trouva la solution architecturale. Utiliser le terrain libre en donnant à l'édifice la forme d'une Croix de Lorraine. C'était parfait (...)

Un matin de juillet 1934, l'abbé Georges DELLWALL, célébra officiellement le 25ème anniversaire de son ordination sacerdotale. Il avait cinquante ans d'âge, vingt-cinq ans de présence à Jœuf. Ses paroissiens firent autour de lui une garde d'honneur et de prière, et voilà que dans le plateau quêteur, une main puissante laissa tomber un chèque royal (...) Il n'y avait plus qu'à commencer les travaux (...)

Extrait du bulletin paroissial d'avril 1924.

La nouvelle église sortit bientôt des chantiers de construction. Aussi quelle joie pour lui et ses paroissiens, le jour où on l'inaugura.

Le curé DELLWALL n'hésite pas à grimper sur les échafaudages pour surveiller les travaux. Son vicaire, l'abbé MICHEL, a même composé une chanson intitulée "Kermesse Populaire", célébrant les mérites du curé, et interprétée dans le cadre des manifestations concourant au financement du projet.

 

Pour la cérémonie de bénédiction de la nouvelle église, le curé DELLWALL, accueille Mgr FLEURY, à son arrivée au presbytère de la "Grand'rue" (19 septembre 1937).

En 1937, Monseigneur FLEURY, récompensait son activité et ses travaux en le nommant Chanoine honoraire. Le curé de Sainte-Croix, accueillait cet honneur avec joie, comme une chose méritée, songeant d'ailleurs au surcroit d'autorité que lui donnerait son camail. Désormais, son nom légendaire sera : Monsieur le Chanoine.

 

 

La Guerre

Son esprit perspicace de Lorrain voyait l'horizon s'assombrir. 1938, première alerte - 1939, c'est la guerre. La mobilisation comme en 1914 bouleverse l'organisation des paroisses. Son vicaire est mobilisé, il lui faudra, seul, assurer la charge de la paroisse. Mois d'attente pénible que cette fin d'année 1939, et commencement 1940. L'ancien adjudant de 1918, ne pouvait pas admettre sans douleur, l'inaction prolongée dans laquelle on laissait l'armée ; il ne voyait pas sans regret l'insouciance, l'indiscipline même, s'installer à tous les degrés de la hiérarchie militaire parmi les troupes de cantonnement. L'avenir lui paraissait sombre. Lors de l'attaque allemande, au mois de mai-juin 1940, une véritable panique déferla sur la région de Briey. (...)

Le chanoine et avec lui le Maire de Jœuf, Monsieur MAGUIN, n'eurent pas un instant d'hésitation ; il fallait rester sur place. Les occupants s'installèrent et, les premiers moments de stupeurs passés, la panique cessa ; mais les préoccupations matérielles et morales augmentèrent, urgentes et cruelles. (...) La municipalité forma de suite un comité chargé de recueillir et de distribuer les vivres à une population angoissée par la crainte du lendemain. Naturellement le Chanoine DELLWALL y fut en bonne place. Il y apportait son talent d'organisateur, et son autorité sans réplique, bien nécessaire devant les exigences de ménagères jamais satisfaites. (...)

La Captivité

Dès le mois de juin 1940, les Allemands, par un mouvement unilatéral, avait annexé de nouveau la Moselle te rétabli l'ancienne frontière de Francfort ; la frontière strictement fermée et jalousement gardée. Or, celle-ci coupait en deux l'étroite Vallée de l'Orne. D'un côté Jœuf, et les cités industrielles d'Auboué et d'Homécourt, que l'on voulait bien, provisoirement, laisser à la France, et de l'autre, Moyeuvre-Grande, avec ses usines et sa ceinture de forêts. Pour ceux qui voulaient franchir clandestinement la barrière dangereuse, il était normal de jeter les yeux sur cette région privilégiée. De fait, bientôt les récalcitrants y affluèrent, prisonniers évadés de leurs stalags, Lorrains qui fuyaient l'uniforme du Grand Reich, ouvriers réfractaires pour le travail en Allemagne, jeunes gens qui voulaient servir la France libre, rodèrent autour de la ligne fatale. Dans la patriote cité jovicienne, ils trouvèrent des aides et des complices ; zèle hardi et dangereux qui devaient payer cher ceux que les griffes de la Gestapo parvenaient à saisir. (...) Le Chanoine DELLWALL fut de ceux-là. Il entra dans une chaine, où l'on hébergeait, ù l'on dirigeait ceux qui se présentaient.

Insouciant du danger, il ne se cachait guère. Certains officiers français dans leurs camps en Allemagne avaient son nom, et lui envoyaient les évadés. A la fin du mois de mars 1942, un douloureux coup de théâtre mit en émoi toute la vallée de l'Orne. Sœur Eustache, supérieure de l'hôpital de Génibois, née le 27 février 1871, à Hayange (Moselle), arrêtée le 28-3-42, décédée à la Maison de correction de Janer (Silésie), le 31-12-1944. Madame FRANCOIS (décédée) et Mademoiselle Andrée FRANCOIS, Madame MASOCO née Lucie PRIMOT, Mademoiselle Marie-Thérèse CREMMEL, Monsieur LOTZ (café Vosgien), Monsieur E. PELTIER (disparu), Monsieur le curé de Franchepré, l'Abbé SCHNEIDER (rentré vers le 10 avril), non déporté, Soeur Elisabeth, arrêtée le 11-4-42, Monsieur Pierre KABGEN, Monsieur SCHWARTZ, gendre de M. KABGEN étaient arrêtés par les Allemands.

Les sbires ignorant la particularité des deux paroisses à Jœuf, avaient emmené par erreur le curé de Génibois, voisin de l'Hôpital, avertissement suprême pour le chanoine DELLWALL ; son sort était réglé. (...) Le 31 mars 1942, la prison de Briey refermait sur lui ses lourdes portes et le lendemain, sans lui laisser emporter ni linge, ni vivres, il partait pour Metz (...) A Metz, on l'interroge et on le torture, sans rien tirer de son silence. Au bout de quelques semaines, il part pour Trèves. En juillet 42, on le retrouve au camp d'Hinzert, et en octobre à la prison de Wittlich, toujours aux environ de Trèves. (...)

Le curé de Jœuf partit pour la prison de Wolhau, en Silésie, en septembre 1943. En janvier 1944, on le met en cellule à Breslau. Son jugement approchait, mais ne fut rendu qu'en février 1944. Il était condamné à quatre ans de travaux forcés. La peine était dure, certes, mais il aurait pu craindre davantage encore. (...)

Le camp de Gross-Rosen en Silésie, devait être sa dernière étape. Sinistre camp, où rien ne manquait : le froid, la faim, la vermine, les maladies, les coups. Monsieur Chabaud de l'institut Pasteur de Paris, fut l'un des derniers témoins. En février 1945, l'abbé était alors malade à l'infirmerie de Gross-Rosen, le Revier III. Dans une lettre adressée à Monseigneur FLEURY, il rend un témoignage désintéressé à sa patience, à sa bonté pour tous, à sa charité sacerdotale qui ne pouvait plus faire autre chose que l'aumône d'une prière à ses camarades moribonds ou déjà décédés. La lettre continue : Quand j'ai quitté le Revier III de Gross-Rosen, le 6 février 1945, le chanoine DELLWALL était encore en vie et comptait parmi les malades incapables d'être évacués par la suite de leur misère. L'abbé était alors convalescent, mais dans un état d'amaigrissement inouï... Il termine en ces paroles : "Il convient, je crois, d'abandonner tout espoir. Le chanoine DELLWALL a-t-il été achevé au camp même, est-il mort de faim ou de coups, a-t-il disparu au cours d'un transport ? Ma piste s'arrête au 6 février. Qu'il ait survécu serait un miracle." (...)

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© C.P.H.J. - Octobre 2008